lundi 9 avril 2012

Ecotrail Paris 2012 : 09. Jouons avec les barrieres horaires

Alors que nous sommes en train de nous restaurer au "point d'eau" de Meudon, situé au 45°km, et que nous reprenons des forces, je parcours ma checklist "virtuelle" (les abeilles ont une imagination débordante, et créent même en pensée des choses "réelles" pouvant leur rendre la vie meilleure. Et la liste se matérialise alors dans mon esprit..)

- Contenu du sac : Ok, peu de ravitaillement utilisé par rapport au stock présent. Et ma poche à eau contient 2,5l donc j'ai de la marge.

- Forme Physique : Globalement pas trop fatigué, un peu éprouvé mais aucun voyant au rouge, bonne nouvelle donc.

- Santé mentale : La dessus, aucun changement ! Bonne nouvelle pour certains, mauvaise nouvelle pour d'autres. Toujours positif et content d'être là ! Donc, tout va bien.

- Moral : Au beau fixe, le ciel est dégagé, seul un vautour tourne haut dans le ciel. Et à chaque fois qu'il ouvre son bec, il semble nous crier : "Barrière horaire, barrière horaire".

Le coach-meneur d'allure sent qu'il ne va pas falloir trop traîner. Il va falloir désormais s'improviser jongleur ou équilibriste. 
Jongler avec les "Stop-crampes" et les phases de relance afin que le temps perdu n'empiète pas trop sur le temps restant. 
Et équilibriste car les périodes de relance ne doivent pas être trop rapides afin laisser la crampe éloignée, et pouvoir se faire plaisir sur les portions courues.
Et, nous poursuivons malgré tout notre route, et comme dans un cirque, où un monsieur loyal présenterait notre numéro : "Mesdames et messieurs, sur la piste centrale, vous pouvez admirer Zebullon et Maya dans leur numéro de jongleur-équilibriste, ils travaillent sans filet, voyez comme ils avancent inlassablement, sans se poser de question, toujours en avant, "Petit pas, petit pas, petit pas"....

Peu avant le ravitaillement en eau à Meudon, un homme tranquillement installé sur une chaise nous avait encouragé et nous avait indiqué la distance nous séparant du point d'eau. Sachant que la notion de distance peut parfois être une notion "relative" suivant les personnes (peu avant l'arrivée au 1° ravitaillement, un bénévole indiquait 800m alors que nous étions à moins de 2km), je l'avait remercié de ses encouragements sans prêter attention à la distance.

Après un "bref" (notion également relative, un arrêt de quelques minutes nous semblent bien bref, alors que pour certains, visant un chrono, cela pourrait sembler une éternité) arrêt, nous étions repartis. En arrivant près de l'observatoire de Meudon, nous avions profité du panorama pour une petite séance photo (voir photos des 2 articles précédents, ici et ). En y regardant de plus près, nous avons tout de même le visage un peu marqué, alors que dans nos souvenirs, nous étions "relativement" bien.

Nous repartons ensuite tranquillement, les jambes répondent bien. Il est plus de 19h30. Alors que Zebullon, a déjà mis son coupe vent depuis quelques temps, je continue toujours en t-shirt manches courtes, la différence de température commence à se faire sentir, mais je préfère malgré tout attendre le prochain ravitaillement afin de me changer.
La partie Meudon - Chaville s'effectue sans trop de souci. 

Juste la désagréable impression que les minutes défilent beaucoup plus vite que les km ! Il nous faut arriver au prochain ravitaillement pour 20h30 et y repartir avant 20h45. 

J'ai de nouveau une petite pression sur les épaules, le meneur d'allure ne rigole plus, le coach reste concentré sur l'allure de Zebullon, le supporter ne cesse d'encourager le groupe, alors que la musique de cirque et que la voix de M. Loyal retentissent au loin. (Alors que le corps effectue son travail d'endurance, l'esprit de l'abeille ne reste pas pour autant dans l'inaction. Comme vous pouvez le constater.).

Sans parler de cette barrière horaire qui s'approche inexorablement, nous (le meneur d'allure, le coach, le supporter, M. Loyal..) nous encourageons. Il nous faut maintenant relancer. Zebullon jongle avec ses crampes (oui, maintenant elle a invité des copines et elles semblent bien s'amuser), je (nous) jongle avec ces minutes qui s'écoulent bien trop vite.

La musique de cirque se fait plus forte, alors que le meneur d'allure se met la pression afin de mener sa mission à son terme. Un bel exercice d'équilibriste !
Alors que la pénombre s'installe autour de nous, je suis littéralement happé par cette ambiance surréaliste. C'est une grande première pour nous, la première fois que nous courons "de nuit". 

Presque euphorique, je m'amuse à cet instant dans les sentiers, je parle, je commente, je fais partager mon plaisir à Zebullon. Un vrai exercice d'équilibriste car nous n'avons pas encore mis nos frontales, et j'ouvre la route en indiquant la meilleure route à suivre et la taille des éventuels cailloux sur lesquels nous devons passer. Nous y voyons encore à peu près bien, nous voyons d'autres coureurs au loin, parfois nous en doublons. Nous sommes "bien". 
L'exercice de jonglage semble être bien maîtrisé. Quasiment sans pauses, nous avançons en direction du prochain ravitaillement. Chaville, nous arrivons !!
D'équilibriste, nous devenons funambule, car la barrière horaire est très proche, et c'est sur un fil invisible que nous évoluons.

Je ne fais désormais quasiment plus mention de l'heure. Il est inutile de stresser l'équipe, le meneur d'allure se doit de gérer.
A l'approche d'une descente un peu prononcée, nous décidons de jouer la carte de la sécurité, mieux vaut perdre 30 secondes afin de sortir la frontale du sac, plus que de glisser sur une pierre et voir la course se terminer stupidement.

Frontale désormais au front, nous repartons. Le meneur d'allure n'est vraiment pas à la fête, le coach surveille en silence, le supporter continue ses encouragements. Le vautour initialement haut dans le ciel semble voler près de nous, ses petits cris "Barrière horaire, barrière horaire" semblent désormais bien plus proches.

Les jambes déroulent, l'allure reste quasi constante, les rayons des frontales virevoltent sur les sentiers.
Grâce (ou à cause) à la frontale, le meneur d'allure lorgne de plus en plus régulièrement le chrono. Le souffle du vautour est désormais très proche.
Le coach nous regarde passer, il est tendu, il reste debout, ne pouvant rester assis comme un simple spectateur.
Le supporter toujours positif, poursuit ses encouragements car tout est encore possible.
M. Loyal, a modifié son discours, il est maintenant plus grave : "Mesdames et Messieurs, nous allons assister à une 1° mondiale, un exercice de haute voltige,..." et un roulement de tambour se met alors à retentir.....

Alors que nous étions passé au 1° ravitaillement situé au 22°km à 14h35 soit avec 1 heure d'avance par rapport à la barrière horaire, notre "avance" avait désormais fondu comme neige au soleil. Il nous fallait maintenant rester vigilant.

Le décompte est désormais lancé !

10 mn avant la barrière horaire.
Nous serpentons dans les sentiers. Nous voyons peu de coureurs.

9 mn avant la barrière horaire.
Afin de ne pas rater les balises, j'alterne le faisceau de ma frontale, passant du mode "vision lointaine" afin de voir les rubans réfléchissants et mode "vision proche" afin de mieux voir le sol.

8 mn avant la barrière horaire.
Le doute s'installe. Et si....
Le meneur d'allure regarde furtivement sa montre, le coach commence à s'arracher les cheveux, M. Loyal toujours silencieux, laisse le roulement de tambour parler à sa place.

7 mn avant la barrière horaire.
Nous continuons d'avancer. Le supporter donne constamment de la voix ! Une façon pour moi, d'évacuer cette tension grandissante.

6 mn avant la barrière horaire.
Le meneur d'allure aimerait accélérer mais cette option n'est pas la bonne et nous poursuivons sur le même rythme.

5 mn avant la barrière horaire.
Nous entendons des personnes au loin. Nous accélérons. Le coach a retrouvé le sourire. Nous sourions également. Nous accélérons.

4 mn avant la barrière horaire.
Il est 20h26, nous arrivons au 2° ravitaillement à Chaville au 55°km !
Le meneur d'allure et le coach sont satisfait, le supporter exulte !! Nous sommes contents.

Nous pouvons maintenant profiter du ravitaillement.

6 commentaires :

  1. Prenant ton récit!
    Quel suspense!
    Il s'en est fallu de peu..

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  2. La suite ! la suite ! la suite !
    On peut dire que tu sais ménager le suspens.
    Encore 23 km... ;-)

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  3. Bravo et bon ravitaillement ! :)

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